Colum McCann, avec Diane Foley
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Comment pardonner aux terroristes ?
Introduction
James Foley est un journaliste américain, kidnappé par Daech, en 2012, alors qu'il couvrait la guerre en Syrie. Otage, avec quatre Français (qui furent libérés), pendant vingt et un mois, « Jim », comme l’appelait ses proches, a finalement été égorgé, puis décapité, en 2014 ; le gouvernement Obama ayant refusé de payer une rançon… Cette exécution, mise en scène sur Internet, a eu un retentissement considérable dans le monde occidental. Parmi les « spectateurs » horrifiés, un écrivain d’origine irlandaise, Colum McCann, qui vit et enseigne à New York, découvre une photo du jeune homme, prise alors qu'il était sur le terrain en Syrie, vêtu d'un gilet pare-balles, absorbé par la lecture d'un roman signé Colum McCann : « Et que le vaste monde poursuive sa course folle ».
Ce roman est inspiré de son enfance, en Irlande, dans un univers de violence et de deuils successifs, entre catholiques et protestants. Il sait qu’il faut beaucoup d’empathie, et de compassion, pour continuer à vivre sans être obsédé par le cycle infernal de la vengeance. D’autant plus qu’en 2020, en pleine pandémie mondiale, il publiait Apeirogon (Belfond), récit fragmenté donnant la parole à deux pères, l’un juif israélien, l’autre Palestinien, chacun en deuil de sa fille, tuée par des « terroristes ».
En octobre 2021, Diane Foley (1), la mère de Jim, décide de rencontrer Alexanda Kotey, Britannique converti à l’islam, qui a plaidé coupable d’assassinat en bande organisée.
Comment une mère peut-elle pardonner à l’assassin de son fils ? Comment garder espoir quand tant d’atrocités sont commises au nom de la religion ? Comment rester digne, et debout, face à la violence, à l’horreur ? Comment regarder cet homme dans les yeux ? Comment contourner la barbarie ? Toutes ces questions, l’écrivain lui a prêté sa plume pour tenter d’y répondre, non sans difficulté. Jour après jour, il l’a accompagnée au procès des bourreaux de James Foley, et vu cette mère puiser dans sa foi, et son humanisme, pour affronter le regard d’un de ceux qui ont torturé, puis tué la chair de sa chair.
De cette expérience forte, Colum McCann a tiré un texte sensible, sans pathos, ni misérabilisme, qui rappelle plusieurs livres touchants de parent de jeunes gens tués au Bataclan, le 13 novembre 2015, notamment : « Vous n’aurez pas ma haine », d’Antoine Leiris (Fayard/Le Livre de Poche). Il faut du talent pour ne pas tomber dans la racolage et le sensationnalisme. Dave Eggers, l’autre grand écrivain américain de sa génération, avait réussi cet exploit, en écrivant l’histoire de Valentino Achak Deng, ce jeune soudanais, qui avait fui les massacre du Darfour, pour demander asile aux Etats-Unis. Cela a donné un autre grand récit : « Le Grand Quoi » (Gallimard, 2006).
American Mother, de Colum McCann, avec Diane Foley, traduit de l’anglais (Irlande) par Clément Baude. 208 p, 21, 90 €, Belfond.
- Diane Foley est présidente de la Fondation James W. Foley Legacy, association avec laquelle elle se mobilise pour attirer l’attention sur la condition des otages et les emprisonnements abusifs dans le monde.
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