Jim Thompson, Thomas Ott
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Introduction
Un bijou éditorial pas neutre pour un chef-d'oeuvre de Pulp
« Souvent copié, jamais égalé, Jim Thompson est mon écrivain de polars préférés » (Stephen King).
« Probablement le narrateur, à la première personne, le plus terrifiant et le plus crédible d'un esprit criminel tordu que j'aie jamais rencontré » (Stanley Kubrick).
« Il est surdoué pour saisir la psychologie des personnages : on ressent avec vivacité la noirceur et la déchéance. » (James Ellroy).
Vous voilà prévenus. C'est du lourd. Frank Dillon, petit vendeur au porte-à-porte, n’arrive plus à joindre les deux bouts et donne le change en maquillant ses bons de commande. Un jour, il sonne chez une vieille acariâtre qui, en guise de paiement, lui propose sa nièce Mona ! Touché par la jeune fille, Frank lui promet de l’aider. Mais il est bientôt arrêté pour détournement de fonds, premier pas vers la chute…
L'oeuvre de Jim Thompson est unique en son genre, mais quand elle est sublimée par une maison d'édition audacieuse, cela confine au sublime. On crie au chef-d'oeuvre ! Et je pèse mes mots. La réédition de A Hell of a woman, sous forme de Pulp Vintage, illustré par Thomas Ott, est un classique collector. Underground... On dirait le graphisme de Robert Crumb, plus noir que noir. Excusez du peu. Même le papier, au grain épais, est de qualité.
Une femme d'enfer. Du sexe. De la folie. De l'alcool. Tout y est. C'est d'une ironie mordante et d'une profondeur psychologique exceptionnelle. Ce texte de l'un des pionniers du roman Noir américain, nous plonge dans la tête de Frank Dillon et nous emmène très loin. Il s'agit d'un petit revendeur d'un bazar à dix sous, qui a un coeur énorme et une conscience en or pur. Malheureusement, les femmes le plongent dans le crime et l'argent sale. On est aux Etats-Unis, dans années 1950 et ça se sent, se voit. Un cahier central propose une biographie avec photo en noir et blanc. Ce roman n’est pas un inédit mais c'est un classique du polar US.
Décédé en 1977, Thompson a laissé une oeuvre très autobiographique. Le cinéma s'en est souvent inspiré. Voir The killer inside me, de Winterbottom, Guet apens de Peckinpah, Les arnaqueurs de Stephen Frears ainsi que Coup de torchon du regretté Bertrand Tavernier. Thompson, comme Raymond Chandler, a lui-même travaillé à une époque pour Hollywood. Alain Corneau a réalisé un de ses meilleurs films (Série Noire), avec Patrick Dewaere, dans un de ses meilleurs rôles, pour incarner le personnage principal de A Hell Of Woman . Titre de l'opus dont nous parlons ici.
En France, ce roman a paru sous le titre Des cliques et des cloaques, en 1967, dans une version tronquée. Puis, en 2013, la version complète est publié chez Rivages, grâce à François Guérif, sous le nom de Une femme d’enfer. C’est cette traduction, la plus récente, signée Danièle Bondil que les éditions suisses de la Baconnière ont décidé de rééditer pour notre plus grand bonheur. Les superbes illustrations de Thomas Ott rendent honneur à ce texte sombre et angoissant. Le format et la mise en page font des clins d’œil au « pulp » d’antan.
Ecrit à la première personne, le récit de Thompson nous fait entrer dans le cerveau limité, dérangé d’un homme qui va se foutre en l’air encore plus rapidement avec l’aide de l’alcool : « Est-ce le dernier des salauds, ou le premier des pauvres types ?” demandait la Série Noire, dans sa quatrième de couverture ,en 1973. Pauvre type, dès le départ, Franck Dillon tente de s’en sortir avec des arnaques médiocres aux gains mesquins. Sa chute semble programmée et on tremble pour celles et ceux qu’il risque d’entraîner vers l’abîme. Il picole comme Charles Bukowski. Cette addiction l’entraîne dans une paranoïa dévastatrice. On a beau savoir que ça va mal finir, on reste fasciné jusqu'au bout.
A Hell of a Woman (Une femme d'enfer), de Jim Thompson, traduit de l'anglais par Danièle Bondil, illustrations Thomas Ott, biographie par Markus Rottman. 206 p, 26, 50 €, Editions La Baconnière (Suisse).
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