ROMAN : TERRA NULLIUS #Polar #Noir #Thriller #Réaliste

Victor Guilbert

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Le flic qui perd la bille

Introduction

Né dans l'imagination débridée d'un dramaturge d'une trentaine d'années (Victor Guilbert), Hugo Boloren est un flic neurasthénique, accro au chocolat (signe de manque affectif...). Dans son premier roman, « Douve » (J'ai Lu), un meurtre lui rappelait son père, flic lui aussi, qui avait été envoyé dans un village, perdu au milieu d’une forêt de sapins, pour enquêter sur un islandais accusé de meurtre (clin d'oeil au polar scandinave, sans doute). Comme son père, il part fouiner à la frontière Belge, au moment même où sa mère, ex-journaliste, souffre de la maladie d'Alzheimer, après avoir écrit un livre sur cette étrange affaire enrobée de mystères...

Tout ça pour dire que le dit-flic, Boloren, est du genre cogiteur. En psychothérapie perpétuelle. L'inspecteur Columbo, mais en moins drôle : «Vous avez un côté exaspérant qui vous rend bizarrement irrésistible. Vous êtes irrésistiblement chiant », lui balance « Lulu », la stagiaire du commissariat où il opère.

Or donc, dans ce second opus, « Terra Nullius » (Hugo & Thriller), notre flic neurasthénique apprend qu’un crime particulièrement horrible (un enfant a été tué) a été commis dans une immense décharge, à ciel ouvert, du Ch'Nord de la France, appelé « Terra Nullius » (d'où le titre du thriller), où survit une communauté marginale, hors du monde légiféré. Ici vivait un garçonnet, nommée « Jimcaale », déguisé en super-héros, qui rêvait de sauver le monde. L'a-t-on assassiné pour cela ?

Hugo Boloren est à deux doigts de perdre la boule. En attendant, il cherche sa bille. Celle qui fait "ding !" pour le mettre sur la bonne piste : « Le problème, dans cette affaire, ce n'est pas le nombre de pièces dans le puzzle, c'est le nombre de puzzles. » On dirait du Audiard... Avant de se mettre en action, Boloren erre dans le commissariat, déprimé, au grand désespoir de la fameuse « Lulu », la stagiaire, qui espérait autre chose d'un policier professionnel.

Le jour où le commissaire Grosset obtient pour la mère d'Hugo un rendez-vous dans la clinique lilloise d'un spécialiste de la maladie d'Alzheimer, un déclic s'opère dans le cerveau tourmenté de cet anti-héros, qui décide d'aller jeter un œil de plus près à ce territoire libertaire. Il va y découvrir l'affaire criminelle la plus sordide de sa carrière.

Dès ce deuxième roman noir, Victor Guilbert, qui a travaillé comme « rédacteur », dans la pub, et a vécu en Chine (à Shanghai), puis à New York, où il s'est installé, a décroché le prix du « Polar Européen 2022 », décerné par le magazine Le Point. Il lui a été remis au récent Festival Quai du Polar de Lyon, succédant ainsi à Pierre Lemaitre, Hervé Le Corre, Olivier Norek, Arnaldur Indridason, Víctor del Árbol, ou encore Philippe Kerr (rien que ça ?!), pour ne citer que les plus connus des précédents lauréats. C'est mérité car ses polars ne se contentent pas de se vouloir distrayants, ils disent le monde désordonné, et violent, dans lequel nous vivons. Ses personnages sont attachants parce qu'ils sont remplis de doute, donc réalistes, comme dans la vraie vie. Victor Guilber, « l'ex-rédacteur », sait manier la plume (Ses dialogues sont excellents, théâtre oblige) et décrire avec nuance les atermoiements psychologiques les plus subtiles dans la tête d'un flic humain, très humain. A suivre…

P.S : chez le même éditeur (Hugo & Cie), signalons « Affaires spéciales : le dossier iO», de Hugo Tosi, qui s'inspirent de faits réels dans les plus « hautes sphères du pouvoir » (et carrément l'Elysée). L'auteur connait manifestement bien ce terrain de « chasse ».

Guillaume Chérel

« Terra Nullius », de Victor Guilbert

345 p, 19, 95 €, Hugo & Thriller.

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