RÉCIT : LE CONSENTEMENT

Vanessa Springora


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La conjuration des lubriques malfaisants


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© éditions Grasset et Fasquelle
Vanessa Springora
© BALTEL_SIPA




Introduction


C'est à la fin des années 80 que j'ai entendu parler pour la première fois d'un écrivain (chauve) qui allait chercher ses conquêtes à la sortie des collèges des beaux quartiers et ça amusait beaucoup Stéphane, un de mes nouveaux camarades de la Sorbonne (1985-86), qui vivait dans les beaux quartiers du XVIe arrondissement de Paris. 

 

Plus tard, Angela, dont la mère était concierge dans ces demeures aisées, m'a raconté qu'une de ses copines de classe était connue pour coucher avec lui, alors qu'elle était mineure. 


Déjà, à l'époque, moi qui rêvais d'être écrivain, je trouvais ça bizarre, malsain.

 

Plus tard, alors que je me suis mis à côtoyer, de loin, la bande de Jean-Edern Hallier, autour de "l'Idiot International", j'ai découvert le nom de ce pervers (narcissique), Gabriel Maztneff, que l'on comparait au « divin marquis »... 

 

Un marquis décadent, oui, ce Sade, dont les « exploits » sexuels, soient-disant raffinés, m'ont toujours laissés froid. 

 

A propos, beaucoup de femmes continuent de fantasmer sur ces pratiques sadomasochistes, en oubliant qu'à l'époque, ces jeunes femmes ont été abusées, maltraitées, violées, voir tuées.

 

Elles n'étaient pas « consentantes », elles.

 

Or donc, non content de s'abreuver de jeunes-filles prépubères, ce gros dégueulasse de Gabriel Maztneff se vantait de s'offrir des « petits culs frais » en Thaïlande, comme le rappelle Vanessa Springora dans son livre, « Le consentement » (j'y viens).

 

Sans doute la raison pour laquelle je n'ai jamais chercher à aller dîner chez Jean-Edern, Place de Vosges, lequel m'avait pourtant à la bonne. 

 

Bien m’en a pris, parce que je ne sais pas quelle attitude j'aurais eu en entendant ce grand malade se vanter de ses « exploits » sexuels à table, au milieu de convives hilares (Marc-Edouard Nabe, Patrick Besson, Charles Dantzig, Benoît Duteurtre, entre autres, qu'ils m'attaquent donc en justice, c'est de notoriété publique, et il y a prescription...). 

 

Le pire est que ce pervers dégénéré était reçu en grandes pompes sur le plateau "d'Apostrophes", interrogé avec sympathie par un Bernard Pivot goguenard. 

 

J'ai sans doute vu (je ne m'en souviens plus), avec soulagement, Denise Bombardier (qui porte bien son nom) lui rentrer dans le lard, sauvant ainsi l'honneur des lettres québécoises. 

 

Car en France, la « moisie », comme l'écrira Philippe Sollers dans "le Monde", on se gaussait, dans les salons de ses parties de jambes en l'air avec des filles de 13-14 ans, et des petits garçons exploités en Asie. 

 

Un Sollers, grand fan de Casanova, admirateur de ce pédophile affirmé puisqu'il a contribué à le faire publier chez Gallimard. 

 

Soixanthuitard lui-même, comme Danny Cohn-Bendit, qui eut ses casseroles (sic!), au nom de la liberté sexuelle, ils ont fermé les yeux sur les agissements de ce prédateur sexuel, comme ils l'ont fait sur les crimes de Mao ; mais c'est une autre histoire. 

 

La liste des signataires, pour le défendre, dans « Libération », est effarante : 

 

Dolto, Sartre, Simone de Beauvoir, Deleuze, etc.... mais pas Foucault, pourtant amateur de pratiques sexuelles délurées, on va dire. 

 

Pétitions, nous apprend Springora, initiées par ce grand manipulateur de Matzneff, qui a tout fait pour se dédouaner, encore aujourd'hui, à près de 84 ans.

 

Plus tard, Frédéric Beigbeder, Thierry Ardisson, Yann Moix prendront le relais, lors de dîners en villes, ou en boite d'échangisme, pour narrer ses nombreuses et répétées conquêtes juvéniles ; comme s'il s'agissait de poupées sans cœur ni cervelles, d'objets sexuels. 

 

Je me rends compte aujourd'hui que si j'étais au courant, tout le monde l'était, forcément, dans tout le petit milieu de l'édition. 

 

Le microcosme germanopratin se référait à André Gide, qui lui-même se tapait de jeunes garçons en Afrique... 

 

Enfin bref, tout cela n'était pas si grave. 

 

Comme si les écrivains étaient au-dessus des lois, à l'instar des politiques. La prétendue élite autoproclamée.

 

Je m'en veux un peu, rétrospectivement, de ne pas avoir ouvert ma gueule, mais j'avais entre 20 et 30 ans, je découvrais le cynisme de ce cénacle autoproclamé élite littéraire, qui s'échangeait, entre-soi, les prix littéraires, à coups de contrats juteux et de renvois d'ascenseurs (voir « Un bon écrivain est un écrivain mort », mon vrai/faux polar satirique - J’ai Lu -où je décris ce « Milieu » mysogyne). 

 

Mais bon, ça ne sert à rien de culpabiliser parce que ma voix n'aurait pas porté. Comme le raconte Vanesa Springora, la police des mœurs était au courant, il était publié dans la Grande Maison (Gallimard). 

 

« G. M », comme elle l'appelle, était protégé, adulé même par François Mitterrand, alors président de la République. Fermez le ban.

 

Tout ça pour dire que j'ai enfin lu ce livre, qui a eu un grand succès, il y a quelques mois, peut-être pas pour les bonnes raisons. 

 

Les gens adorent savoir ce qui se passe dans le lit des « people ». Je n'ai pas voulu me ruer sur ce livre, parce que je savais déjà l'essentiel, je ne suis pas un mouton... 

 

Je me méfie du voyeurisme. Mais, ayant approché l'autrice, au Salon du Livre, devenue la cheffe éditrice des éditions Julliard, entre temps, j'ai eu envie de le lire après la tempête, à tête reposée. 

 

Notamment après l'avoir vue en parler avec calme et émotion à la Grande Librairie, animée par un François Busnel qui a aussi bien connu et reçu... passons.

 

Vanessa Springora a réussi à me passionner pour cette histoire, somme toute sordide, car elle l'a écrit avec ses tripes. 

 

Son livre est concis, sans fioritures et très bien conçu. 

 

Ce n'est pas un brûlot à charge, c'est un conte pour adultes, écrit avec calme et décence. La construction est très habile et la plume assurée. 

Moi qui ne voulait pas lire « Lolita », de Nabokov, pour les raisons expliquées ci-dessus, elle m'a donné envie de le lire. 

 

Il a dû lui servir de thérapie, ce livre, après le sentiment d'injustice vécu, quand elle a appris qu'après s'être repu de sa chair, de son corps, il lui avait vampirisé l'âme, sucé la moelle, en faisant d'elle - comme d'autres ex-jeunes filles au background identique (pas de père, pas de repères), une mère complice, voire envieuse, un personnage de fiction, désincarné. 

 

Une deuxième fois utilisée, une seconde fois manipulée, abusée par cet ogre. Ce Barbe-Bleu aux allures d'éternel adolescent. Effrayé à l'idée de vieillir, sans doute. 

 

Un homme immature. Un lâche qui s'en prend à plus faible. On appelle ça un prédateur sexuel. Un loup de bac à sable... 

 

Ces hommes n'ont aucun respect pour l'autre. Tout les ramène à eux. Ce sont les pires des égocentriques parce qu'ils n'éprouvent aucune empathie pour leurs victimes, avec qui ils jouent comme le chat avec une souris, avant de la dévorer. 

 

Comme les serial-killers. 

Comme eux, ils se font passer pour les victimes.

 

La goutte d'eau qui a fait déborder le vase, pour Springora, fut de le voir recevoir le prestigieux Prix Renaudot, remis par une bande d'auteurs installés, comme FOG, « Belvédère » et compagnie... 

 

Lesquels se sont empressés de renier leur amitié de parfois trente ans. Des lâches. Hypocrites. Ces complices... collabos. 

 

Je pèse mes mots. 

 

On sent bien que la jeune Vanessa Springora l'a aimé très fort ce « G.M » (j'aime...), parce qu'il a semblé combler son manque de l'amour d'un père absent, indifférent. 

 

Elle réussit le tour de force non pas de l'excuser, mais de trouver une raison logique cette perversité : il aurait lui-même été « initié » (dixit), à 13 ans, par un homme... 

 

On sait que la quasi totalité des pédophiles, pédocriminels, ont été abusés eux-mêmes enfants. 

 

Ils reproduisent ce qu'ils ont subi, en quelque sorte, comme pour se déculpabiliser. Mais notre « G.M » est tellement joueur et menteur, qu'il pourrait avoir tout inventé (il n'a pas dit « violé » mais initié... comme à Rome et en Grèce antique, ça fait mieux avaler la pilule). 

 

Vanessa Springora n'hésite pas à employer les mots crus et les images qui dérangent : à l'âge, et à l'heure, où elle aurait dû goûter un éclair au chocolat, par exemple, à la sortie de l'école, c'est un pénis d'adulte qu'elle avait dans la bouche ou dans l’anus.

 

Ne nous leurrons pas, Gabriel Matzneff n'a aucun regrets : pour lui il avait tous les droits puisque c'était pour son oeuvre. 

 

Comme les anciens nazis, cette élite littéraire (et bourgeoise) autoproclamée, encore une fois, n'a aucune considératon pour celles et ceux qu'ils considèrent comme des inférieurs : femmes, jeunes asiatiques... juifs. 

 

Condescendants et vaniteux, ils méprisent les faibles. 

 

Il y a un côté diabolique chez ces êtres dangereux car ils n'ont plus de morale que la leur. Ils sont tellement dans la fiction et le paraître qu'ils en oublient la bienveillance. 

 

Aujourd'hui encore, prescription oblige, Gabriel Matzneff n'a pas été condamné par la justice. 

 

Mais il l'a été de la meilleure des manières par une Vanessa Springora qu'il entendait continuer à harceler (lettres, mails). 

 

Par le mépris, sans aucune compassion (ce serait trop facile) elle l'a exécuté littérairement. Son pire cauchemar. 

 

Elle a dépassé le maître en un seul livre couperet. Ce n'est plus lui l'écrivain. C'est elle. 

 

Lui n'est plus qu'un malade sexuel qu'il est trop tard de soigner. Condamné. Il était temps que la chèvre de monsieur Seguin exécute le loup. Sans larmes ni lubrifiant. A sec. Vanessa s'est tapé « G.M »... Is dead. 

 

Aux oubliettes de la littérature.

 

Le pitch

 

Au milieu des années 80, élevée par une mère divorcée, V. comble par la lecture le vide laissé par un père aux abonnés absents. 

 

A treize ans, dans un dîner, elle rencontre G. , un écrivain dont elle ignore la réputation sulfureuse. 

 

Dès le premier regard, elle est happée par le charisme de cet homme de cinquante ans aux faux airs de bonze, par ses oeillades énamourées et l'attention qu'il lui porte.


Plus tard, elle reçoit une lettre où il lui déclare son besoin " impérieux " de la revoir. 

 

Omniprésent, passionné, G. parvient à la rassurer : il l'aime et ne lui fera aucun mal. Alors qu'elle vient d'avoir quatorze ans, V. s'offre à lui corps et âme. 

 

Les menaces de la brigade des mineurs renforcent cette idylle dangereusement romanesque. 

 

Mais la désillusion est terrible quand V. comprend que G. collectionne depuis toujours les amours avec des adolescentes, et pratique le tourisme sexuel dans des pays où les mineurs sont vulnérables.


Derrière les apparences flatteuses de l'homme de lettres, se cache un prédateur, couvert par une partie du milieu littéraire.


V. tente de s'arracher à l'emprise qu'il exerce sur elle, tandis qu'il s'apprête à raconter leur histoire dans un roman. 

 

Après leur rupture, le calvaire continue, car l'écrivain ne cesse de réactiver la souffrance de V. à coup de publications et de harcèlement.


" Depuis tant d'années, mes rêves sont peuplés de meurtres et de vengeance. Jusqu'au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence : prendre le chasseur à son propre piège, l'enfermer dans un livre " , écrit-elle en préambule de ce récit libérateur.

 

Plus de trente ans après les faits, Vanessa Springora livre ce texte fulgurant, d'une sidérante lucidité, écrit dans une langue remarquable. 

 

Elle y dépeint un processus de manipulation psychique implacable et l'ambiguïté effrayante dans laquelle est placée la victime consentante, amoureuse.


Mais au-delà de son histoire individuelle, elle questionne aussi les dérives d'une époque, et la complaisance d'un milieu aveuglé par le talent et la célébrité.

 

Guillaume Chérel

Le Consentement, de Vanessa Springora 

(205 p, 18 €, Grasset et Fasquelle).

 

 





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