ROMAN : L'ILLUSION DU MAL

Piergiorgio Pulixi


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E pericoloso Sporgersi ! (*)


L’illusion du mal #Thriller #Italie  #TéléRéalité #TéléPoubelle #Popularité #Justice #Corruption #Enquête #Société  Piergiorgio Pulixi



Introduction


Le nouveau roi du thriller est italien, c’est entendu. Il s’appelle Piergiorgio Pulixi et ça fera des vacances à celles et ceux qui en ont soupé des polars neurasthéniques venues de Scandinavie… Pulixi est né en 1982 à Cagliari, dans le sud de la Sardaigne. Il a été libraire, avant de devenir écrivain, à la suite d’une longue expérience d'écriture collective de romans noirs. Il a fini par se lancer en solo dans une saga policière en quatre volumes, récompensée par le prix Glauco-Felici et le prix Garfagnana in Giallo. Après « L'île des âmes » (prix Scerbanenco), « L'Illusion du mal », son nouveau roman, a reçu le prix Fedeli 2021.


Voici le pitch. A travers toute l'Italie, les téléphones portables vibrent au même moment. Des milliers de personnes reçoivent une vidéo intitulée : « La loi, c'est toi ». A l'écran, un criminel ligoté et un justicier masqué, coiffé d’une perruque orange – que l’on va surnommer « Le dentiste – prend la parole. Son objectif : faire voter le public en ligne sur le sort de son prisonnier (un pédophile), qu'un système judiciaire inefficace et corrompu a laissé impuni. La vindicte populaire sera évidemment sans appel. Comme dans les arènes de Rome, elle baisse le pouce : c’est la mort.

 

Même si c’est une crapule, le criminologue Vito Strega (grand et beau métis musclé) ne peut laisser ce nouveau Dexter imposer la loi du Talion. Il est confronté à un ennemi insaisissable, au moins aussi intelligent que lui, à la popularité grandissante, car la télé poubelle en a fait une sorte de Joker (cf. Batman)… Pour l’aider, deux femmes flics, Mara Rais et Eva Croce, aussi différentes qu'imprévisibles, sont chargées de l'enquête. Les fans de Pulixi les ont découvertes avec « l’Ile des âmes », qui se passe en Sardaigne, dont est originaire l’auteur, rappelons-le.

 

Il s’agit indéniablement d’un « page turner ». Les scènes ont beau être cousues de fil blanc, on se laisse prendre. C’est addictif. Piergiorgio est très habile. Il saupoudre son récit de tous les éléments indispensables à un bon « thriller » à l’anglosaxonne (coups de théâtre, suspense, amourettes potentielles, amitié virile, contexte politique et sociologique, humour… régionalisme, nationalisme), en y apportant la Latin-touch. On est entre Camilleri (Andrea, le Sicilien) et Maxime Chattam, mâtiné de Dan Brown. Autant dire que les amoureux de la littérature américaine, tendance « Nature writing », peuvent être déstabilisés, car c’est la première fois que Gallmeister publie ce genre de best-seller annoncé, européen de surcroit. Il a dû remporter les enchères pour les droits (ça rime).

 

L’ensemble est de bonne facture. C’est du travail de pro. On s’attache aux personnages (et à leurs jurons en sarde, ou en sicilien) et le sujet de société choisi est bien trouvé, au moment où l’Italie retombe dans les travers mussoliniens. Ça traîne parfois en longueur mais les chapitres sont courts, alors ça passe. On dirait ce polar prémâché pour une série Netflix. Au moment où j’écris ces lignes, le contrat doit déjà être signé. Franchement, il y a pire. On est dans l’édition loisir qui fait réfléchir. C’est déjà beaucoup pour ce genre de littérature. Les passionnés de beau style peuvent toujours relire Moravia.

 

Guillaume Chérel

 

« L’illusion du mal », de Piergiorgio Pulixi, traduit par Anatole Pons-Remaux, 600 p, 25, 90 €, Gallmeister.

 

P.S : chez le même éditeur, dans la collection « Totem », signalons la réédition de deux poids lourds de la littérature du « Grand Dehors », citée plus haut, Edward Abbey (« En descendant la rivière », « Désert Solitaire », le Gang de la clef à molette ») et Doug Peacock (« Marcher vers l’horizon », « Mes années grizzly »).


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