ROMAN : EN ATTENDANT DOGO

Jean-Bernard Pouy


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JB is Back and White

ou, des Pouy dans la tête


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Introduction


Jean-Bernard Pouy a peut-être inventé un genre : le « polar littéraire ». Comprenez que ses romans (noirs) peuvent se lire entre les lignes (blanches). Il y a l’histoire, la trame, l’énigme, le pitch, l’intrigue, appelez-ça comme vous voulez. Mais lui, ce qui l’intéresse, c’est de jouer avec les mots, les concepts, les idées (plus ou moins hautes : les jeux de mots sont parfois tirés par les schleus). Vous l’aurez compris, « En attendant Dogo », son nouvel opus, fait évidemment référence au Godot de Becket, mais en plus drôle.


L’une des singularités du créateur du Poulpe étant de ne pas se prendre au sérieux, cette fois encore, on en a pour son agent (littéraire). Étienne, trentenaire parisien, célibataire et solitaire, a la particularité de commencer des romans, sans les terminer. Un jour, il disparaît subitement, sans explications (comme des centaines de personnes, chaque année). Après six mois, personne (en premier lieu la police) n'a trouvé la moindre piste criminelle, ni le début d'une explication rationnelle. Sa famille, surtout sa sœur, se fait un sang d’encre. Comment imaginer que « Dogo », comme l’a surnommé Simone (la fameuse frangine), parce qu’il est toujours en retard, ait volontairement pris la tangente ?

 

La sœur éplorée décide de partir à sa recherche dans une France, rance et sans dessous-dessus. A poil, quoi ! Paris se vide, comme en Mai 68. C’est le bordel, tout le monde fait grève. C’est la crise, mais surtout pour les politiques, étant donné que seulement 10 % de la population vote. Les jours de suffrage artificiel, le peuple quitte les grandes villes pour aller récolter le miel, entre autres, qu’il vend en commerce équitable. La solidarité opère et se généralise. La société se collectivise. L’anarchie règne, au bon sens du terme, puisque chacun se responsabilise et s’entraide. Les Gilets Jaunes votent Blanc et les rouges sont noirs de colère.

 

En attendant, Simone se laisse convaincre de chercher dans ses débuts de romans inachevés. C’est un séduisant détective qui lui a bourré le mou, mais pas que. D’après lui, ses textes, écrit sous le pseudonyme de Richard Reis (R.R) sont des pastiches, voire des exercices de style dédiés à Raymond Roussel (R.R, mêmes initiales), cet hurluberlu aux mots vagabonds. Il n’avait aucun succès, mais il s’en moquait, il était riche. Son truc, c’était les mécanismes de construction/déconstruction du langage, et du contresens (autant dire du quasi illisible, sauf pour un cénacle, une élite d’initiés autoproclamée). 

 

Pas étonnant que les surréalistes se soient intéressés à lui, avant Georges Perec. Et J-B Pouy (« Jibé » pour les intimes), donc, qui participa souvent aux « Papous dans la tête », cette émission de radio de France Culture dédiée à l’Oulipo (et vive Zazie dans le Queneau !). Il en connait un bout en lis-tes-ratures… Comprenne qui « pourrave », cela semble être son crédo.

 

Or donc, Simone débute son enquête en voiture (forcément !), avant de prendre le train (en marche), sans s’arrêter à Eboli… Non seulement elle comprend que tchi aux joutes littéraires que mène son frère, mais elle rentre chaque fois bredouille de ses escapades dans le passé familial. Jusqu’au jour où elle rencontre un véritable érudit, un littéraire, également éditeur à ses heures, qui voulait bien publier le dit frérot disparu. Nous n’allons pas « spoiler », évidemment, mais sachez que le lascar aurait été vu roulant en Porsche, lui qui était fauché.

 

Lire un livre de Jean-Bernard Pouy, c’est comme ouvrir une pochette surprise, ou voir un film de Jean-Luc Godard. On peut éventuellement être parfois déçu, mais impossible de deviner ce qu’il y a dedans. Ici, il débute léger, comme un polar de gare, et termine en beauté par un long monologue lucidement désespéré, qui se clôt (presque) par une citation de Rimbaud : « La vraie vie est absente. Nous ne sommes pas au monde… La vie est la farce à mener par tous ». Car, le meilleur est pour la fin. Au chapitre Dix-neuf, il y a écrit : « Rien ». Du (bon) « Jibé » tout craché.

 

Guillaume Chérel

 

« En attendant Dogo », de Jean-Bernard Pouy, 

La Noire / Gallimard, 200 p, 18 €.  


Valencienne, 2007.

Jean-Bernard Pouy et Paul Bloas sur le thème de la précarité.


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