DEUX POLARS VENUS D'AILLEURS

Wojciech ChmielarzParker Bilal


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Couverture Les Ombres  #Romans #Pologne #Polar #Noir #Enquête #Politique #Singes #Armes #Crimes #Viols
© Agullo Noir
Wojciech Chmielarz
© sous réserve de droits




Introduction


« Quand vous commencez à travailler dans un hôtel, écrit Wojciech Chmielarz, dans Les Ombres, la première chose qu’on vous enseigne, c’est : « Observez avec attention ». La seconde : « Oubliez aussitôt ce que vous avez vu. ». L’auteur polonais, considéré comme le nouveau roi du roman noir de l’Est (prix du meilleur polar de l’année 2020), fait évidemment tout le contraire. Il balance, comme on dit, que ce soit sur les politiques locaux, les cathos homophobes, les russes trop présents depuis la chute du mur de Berlin, la mafia et les empêcheurs de tourne en rond phallocrates dans ce qui se dit une démocratie.


Récemment, le cadavre d'un gangster disparu dans des circonstances mystérieuses six ans plus tôt a été retrouvé par l'inspecteur Kochan, ex-partenaire d'enquêtes de Jacub Mortka, dit « le Kub ». Quelques jours plus tard, la femme et la fille du gangster sont retrouvées mortes, abattues avec l'arme de Kochan. Flic et mari violent, ce dernier ne trouve pas grand monde pour le défendre et décide de se cacher. Il appelle tout de même Mortka, qui ne croit pas à la culpabilité de son collègue et va donc s'efforcer de trouver la vérité en travaillant discrètement. 

 

Pendant ce temps, « la Sèche », une jeune adjointe du Kub, découvre sur une clé USB la vidéo du viol collectif d'un jeune garçon, où figurent des politiciens de haut rang. Si elle révèle ce film à sa hiérarchie, elle sait que l'affaire sera étouffée, vu la stature des hommes impliqués. Mortka et la Sèche décident de s'entraider (ils ne savent pas encore que leurs enquêtes sont liées et qu'ils feront face à la mort en essayant de résoudre ces crimes). 

 

Et au centre de tout, il y a Borzsestowski, le grand requin du crime organisé à Varsovie. Dans ce dernier volet des aventures de l'inspecteur Mortka, le Kub règlera enfin ses comptes avec l'ombre maléfique qui plane sur Varsovie, à savoir le « milieu ». Et pour ce faire, il devra faire le ménage parmi quelques collègues ripoux. 

 

On peut lire cet opus sans avoir lu les autres, mais il donne justement envie de les découvrir, parce que ça change des polars anglo-saxons, scandinaves… et français. On connaît déjà mal la littérature polonaise, en général, alors le roman noir ! C’est écrit efficacement, sans envolées lyriques, avec beaucoup de dialogues (qui mériteraient d’être élagués parfois), comme dans une série TV. Pas étonnant que l’un les polars de ce Wojciech Chmielarz (37 ans) ait déjà été adapté en série pour Canal + Pologne.


Couverture Les Divinités #Londres #Tamise #Communautarisme #Kurdes #Guerre #Religions #Charia
© Gallimard, Série Noire
Parker Bilal   ©-Aisha-Seeberg
© Aisha Seeberg


Du côté de Londres

 

Passons à Parker Bilal (alias Jamal Mahjoub), et son nouveau polar (un pavé également) : « Les Divinités ». Il se déroule sur les bords de la Tamise, à Londres, mais dans une Angleterre aux prises avec le communautarisme et la mafia multi-ethnique. Un certain Howard Thwaite, promoteur immobilier arrogant et influent, a lancé à « Battersea », un site prestigieux face à face à la fameuse Tamise, la construction d’un complexe d’appartements de luxe. 

 

À l’aube, le gardien kurde découvre au fond d’un vaste chantier deux corps ensevelis sous un monceau de pierres. Il s’avère qu’il s’agit de l’épouse du promoteur et collectionneur d’art, citoyen français d’origine japonaise. Mal noté et rétrogradé récemment, pour mauvaise conduite, le sergent Khal Drake, vieux flic musulman, vétéran de la guerre en Irak, enquête, flanqué contre son gré d’une belle psychologue anglo-iranienne, Ray Crane. Ni l’un ni l’autre ne sont blancs. Comme les travailleurs clandestins exploités par le kurde cité plus haut. 

 

La miss Crane songe à la lapidation, châtiment prévu par la charia. Drake, lui, lorgne du côté de la cité multiraciale de Freetown - qu’il connait bien parce qu’il a vécu en banlieue, (mal) élevé par sa mère alcoolique - et de l’incendie d’une mosquée jadis synagogue. 

 

Le principal intérêt de ce polar, écrit somme toute de manière classique (avec beaucoup de dialogues et de scènes de crimes formatés pour la TV, une fois encore), réside dans la description des tensions communautaires, les flash-backs sur la guerre et son enfance difficile. Parker Bilal dresse le portrait sans compromis d’une société anglaise divisée, aux repères traditionnels brouillés. Une belle découverte, également, si on ne connait pas cet auteur, qui comme l’auteur polonais cité plus haut, ose dresser le portrait de notre société larvée, gangrénée par des fonds d’argent venus d’ailleurs. Sans faire de politique, il décrit les excès de l’ultra-libéralisme, sans oublier de stigmatiser le retour de l’obscurantisme religieux. C’est la définition même d’un vrai roman noir.  

 

Guillaume Chérel

 

Les Ombres, de Wojciech Chmielarz,

traduit du polonais par Caroline Raszka-Dewez,

534 p, 22 €, Agullo Noir. 

 

Et 

 

Les Divinités, de Parker Bilal,

traduit de l’anglais par Philippe Loubat-Delfranc,

464 p, 22 €, la Série Noire / Gallimard.





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