BD : PIMENTS ZOIZOS (les oubliés de la Réunion)

Tehem


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Le scandale (oublié) des "enfants de la Creuse"


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© Editions Steinkis
© sous réserve de droits
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Introduction


Entre 1962 et 1984, quelque 2 000 mineurs de La Réunion ont été séparés de leur famille et envoyés en France, où leur était promise une vie meilleure. 

 

Michel Debré, qui était alors député de la Réunion, a lancé une vaste opération de déportation d'enfants réunionnais vers des départements peu peuplés en métropole comme la Creuse. 


émigration Réunion
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Avec les dégâts psychologiques que l'on mesure seulement depuis 2014, date à laquelle la députée Ericka Bareigt, a déclaré dans une motion que « l'Etat a manqué à sa responsabilité morale envers ses pupilles » (alors que la plupart des enfants « enlevés » n'étaient pas orphelins…) 

 

Elle a demandé la mise en œuvre d'une enquête approfondie. 

 

L'étude de la commission présidée par le sociologue Philippe Vitale, lancée en 2016, a été rendue publique en avril 2018. Des propositions pour apporter des réponses aux victimes ont été formulées (des indemnisations, par exemple). 

 

Deux ans plus tard, rien n'a été mis en œuvre, hormis un voyage de retour pour rechercher ses racines, accordé dès février 2017. 

 

Des livres ont été écrits... et Piments Zoizos, roman graphique d'une précision (historique) et d'une humanité remarquables, sans manichéisme. 

 

En effet, tout n'est pas tout blanc ou tout noir (surtout à la Réunion), car certains éducateurs, et autres assistantes sociales et bonne soeurs, ont vraiment cru bien faire en les arrachant à la misère, voire la violence sexuelle. 

 

C'est une des principales richesses de cette oeuvre subtile. 


Enfant départ famille
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On est en plein post-colonialisme. Le racisme est de mise et l'oppression de classe dominante évidente, bref, ça partait d'un bon sentiment (de supériorité, surtout).

 

Richement documenté, par deux réunionnais, la BD raconte le parcours d'enfants arrachés à leur famille (pauvre, il est vraiquasiment sans explications. 

 

Nous suivons tout particulièrement Jean (« Zean » en Kréole), séparé de sa petite sœur, « Didi », après avoir crevé un ballon...

 

Toute sa vie, il croira avoir été puni pour cette grosse bêtise. 

 

La vérité est que sa maman perdait pied, peu à peu, après la mort de son mari alcoolique. Elle s'est laissé convaincre d'abandonner deux de ses plus grands enfants aux services sociaux. 

 

S'enchaîne alors la découverte de l'orphelinat où les frères et soeurs sont vite séparés. 

 

Ils se croisent, et se retrouvent, sans le savoir, dans la ville de Guéret. 

Trois possibilités « s'offrent » à eux : 

 

être adoptés, ou servir de main-d’œuvre aux fermiers, sinon ou c'est le « foyer » de la DDASS. 

 

On leur change leur nom (du coup, quasi impossible de retrouver leurs proches, ensuite), et un long périple commence, de foyer en foyer. 

 

Mais « Zean » a de la jugeote, il est rebelle. 


extrait BD 1
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Extrait BD 2
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Sa première famille d'accueil plutôt gentille l'abandonne brutalement, une fois que la maman tombe enceinte...  

 

Il se retrouve ensuite à faire le bouche-trou dans les fermes alentours, ou le ménage dans une école ; sans compter qu'on lui colle un débile mental (métropolitainaux basques.

 

Une fois devenu adulte, il s'engage dans l'armée, puis il part à la recherche de ses racines, donc de sa sœur, en premier lieu. 

 

Les noms ayant été changés, c'est quasi mission impossible. D'autant plus que l'administration a fait des erreurs. 

 

Ce récit est passionnant car il est émouvant. On éprouve de la tendresse pour ces « marmailles » ballotés et moqués pour leur « kréole ». 

 

Thehem ne tombe pas dans le misérabilisme. L'humour étant la politesse du désespoir, il traite ces enfants... comme des enfants, rieurs, moqueurs, espiègles, fugueurs et solidaires face à ce monde d'adultes absurde, ou certaines grandes personnes, plus empathiques, tentent de les aider. 


Extrait BD 3
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Extrait BD 4
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La trajectoire de « Zean » et de ses copains réunionnais est entrecoupé de documents réels, qui remettent les choses en perspective. 

 

Le dialogue entre le dessinateur et l'historien en guise de prologue, donne bien l'idée de l'enjeu : raconter sans édulcorer, ni en rajouter dans l'apitoiement. 

 

Car l'on comprend bien que si on n'en parle pas trop, de cette fâcheuse histoire, qui rappelle le sort des indiens d'Amérique, ou des aborigènes, c'est qu'à la Réunion même, certaines familles n'ont pas intérêt à voir revenir les survivants de ce « temps, longtemps », comme on dit là-bas... 

 

Rapport à l'héritage, entre autres. 

 

Sans parler de ceux qui n'ont aucune envie de revenir, ou de remuer les mauvais souvenirs. Le mal est fait. Rien ne pourra réparer les dégâts psychologiques. 

 

Il ne reste qu'à essayer de comprendre et pardonner. 

 

Pour avancer. Piments Zoizos est un récit graphique qui pique la langue, mais tant qu'elle ne tombe pas, la vie continue. Comme cette jolie langue « Kréole », qui est tout sauf du « petit nègre ». 

 

Une œuvre majeure.

 

Guillaume Chérel

 

Piments zoizos (Les oubliés de la Réunion), 

de Tehem, Editions Steinkis, 160 p, 18 €.


Enfants Réunion Creuse
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Le pitch

 

Les aficionados de la BD connaissent le travail de Tehem (Malika Secouss, Tiburce, Soleil Zoreil, Crache ta joie...), de son vrai nom Thierry Maunier, né en région parisienne mais pour qui la Réunion n'a pas de secret, puisque ses parents sont retournés sur leur île natale quand il avait cinq ans. 

 

Rappelons qu'elle n'a rien à voir avec les Antilles (dont le créole est différent), puisqu'elle se trouve dans l'Océan Indien, près de la Corne de l'Afrique et de Madagascar. 

 

L'histoire véridique qu'il nous raconte ici, avec l'aide de l'historien Gilles Gauvin, est un des secrets les mieux gardés de l'Histoire de France récente, en général, et de la Ve République, en particulier. 

 

Années 1960. Dans un quartier populaire d’une ville de La Réunion, Jean et Madeleine sont arrachés à leur mère par les services sociaux qui leur promettent une vie meilleure en métropole, une bonne éducation et des retours réguliers sur leur île. 

 

Transplantés en Creuse, Jean et Madeleine sont séparés. De foyers en familles d’accueil, Jean rencontre d’autres enfants réunionnais dans la même situation que lui. 

 

Une vie durant, entre errances et recherches, il tentera de comprendre pourquoi. 

 

De son côté, Lucien, jeune fonctionnaire fraîchement affecté à La Réunion, arrive à la préfecture et découvre ses fonctions à la Section 4 : il devra notamment superviser le transfert de « pupilles de l’Etat » dans l’hexagone. 





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